Le womanifeste*, élaboré par le comité d’accompagnement, est une série de positionnements éthiques et organisationnels  déterminants à la fois l’organisation et l’économie des productions de la saison matrimoine. Cet ensemble de “questions dramaturgiques générales“ constitue un ensemble de contraintes et d’incitations dans lesquelles l’équipe de production, le comité d’accompagnement lui même et l’ensemble des équipes créatives (artistiques et techniques) doivent s’inscrire. 

*Tous droits réservés, toutes reproductions et/ou rediffusions doit faire l’objet d’une demande d’autorisation auprès d’Ecarlate la Compagnie. 

Les ouvroirs

  • Comment déconstruire ses angles morts ?
    Le secteur culturel n’est pas en amont des questionnements sociétaux. Il est encore trop souvent l’expression, ou pire, le démultiplicateur des discriminations qui s’exercent au sein de la société. En ce sens, le manifeste n’est donc jamais considéré comme abouti et il donne lieu à des améliorations, édition après édition.
  • Comment œuvrer sur le langage ?
    Le terme femmes* est employé ici au sens trouble, de sorte à élargir le sujet politique des femmes, et à penser celui-ci dans sa diversité en termes d’identité de genre, de classe, de diversité ethno-culturelle, d’orientation sexuelle, de handicap, de corpulence, etc. 
  • Comment redonner aux femmes* leur place dans l’Histoire ?
    La Deuxième Scène Acte 5 entend travailler à une meilleure visibilité des femmes* et des artistes femmes*, d’hier et d’aujourd’hui, pour promouvoir l’égalité et la justice, à la fois dans le secteur du spectacle vivant et dans la représentation que l’on a de l’Histoire. 
  • Comment lutter contre les stéréotypes de genre ?
    Il s’agit de penser l’articulation entre représentation et représentativité : au-delà de la question de la représentativité des femmes* au sens trouble sur les plateaux de théâtre (en termes de quotas par exemple), il s’agit également de savoir dans quels rôles les interprètes sont distribué·es, si ces rôles reconduisent ou non des normes de genre. En ce sens, une attention particulière sera portée à la qualité de la composition des personnages/entités/figures, c’est-à-dire aux instances porteuses de la parole et/ou de l’action, en tendant vers la complexité et la densité pour éviter les écueils d’un usage essentialiste des stéréotypes.
  • Comment (re)penser l’équilibre politique dans un contexte de création artistique ?
    La structure même de l’équipe de création est politique. Au cours de l’Histoire, des rapports hiérarchiques abusifs se sont développés entre les différentes fonctions au sein des équipes de création. La Deuxième Scène Acte 5 s’interroge sur la distribution possible ou souhaitable des pouvoirs au sein des équipes artistiques, techniques et de production, ainsi que dans les relations que ces équipes entretiennent entre elles.
  • Comment déconstruire la répartition genrée des corps de métier et des fonctions hiérarchiques dans le champ du spectacle vivant ?
    Il s’agit de lutter contre la perte de valeur symbolique des métiers investis par les femmes, de réfléchir aux questions symboliques et politiques des questions de genre appliquées au champ de l’art.
  • Comment échapper à l’injonction à la perfection et à l’idéal ?
    À l’injonction à la réussite et à la reproduction d’une norme de résultat, nous préférons la recherche, le chemin, la lutte contre la compétition et tout ce qui permet de libérer les puissances de l’imagination.

Les bornes

  • Un comité d’accompagnement est constitué. Il est garant de l’éthique et de la cohésion de l’ensemble du projet la Deuxième Scène Acte 5. Il porte un regard sur la cohérence esthétique, politique et artistique du projet, ainsi que sur la production administrative et financière.
  • Le statut de créatrice se conçoit dans l’inscription d’un mouvement global qui invite à la sororité et à la curiosité. Nous ne sommes pas seules, d’autres avant nous ont travaillé et d’autres travaillent ailleurs sur le sujet du matrimoine. L’ensemble des personnes travaillant dans le cadre de la Deuxième Scène Acte 5 s’engage à prendre connaissance des tentatives autres et des apports précédents, à les prolonger et/ou les améliorer et/ou les faire connaître.
  • Le comité d’accompagnement suit les artistes dans la traduction de questions philosophiques, éthiques, esthétiques et historiques en possibles de plateau. Ce soutien prend différentes formes: nourrir l’imagination, retravailler des formes, inviter à des lectures (théoriques ou littéraires), prendre soin de soi et des autres dans un processus créatif.
  • Les artistes de la Deuxième Scène Acte 5 s’engagent à lutter contre la compétition et à favoriser la coopération, la sororité, l’adelphité et plus largement la solidarité en co-créant un objet artistique distribué dans l’ensemble des créations. Il s’agit d’enclencher des processus de création à la fois individuels et collectifs, dans lesquels les œuvres se parlent et se répondent.
  • Au moins un tiers des personnes travaillant dans la Deuxième Scène Acte 5, dans chaque catégorie de création (mise en scène, jeu, scénographie, création technique) et dans les équipes de production et d’accompagnement se trouve être  au croisement des discriminations, qu’elles soient liées à l’âge, l’origine ethno-culturelle, l’identité de genre, la classe, la validité, l’orientation sexuelle, etc.
  • L’adaptation d’œuvres du matrimoine littéraire sur scène est inhérente au projet de la Deuxième Scène Acte 5. Plus qu’une base de travail, l’œuvre littéraire, telle quelle, performée ou adaptée imprègne la matière théâtrale par sa langue, sa structure et son mouvement.
  • Pour cette édition, les centres d’archives sont privilégiés, mais la Deuxième Scène Acte 5 s’engage à rechercher d’autres sources/lieux où chercher des traces d’un matrimoine.
  • Si elle le souhaite, une créatrice au croisement des mêmes discriminations que le sujet des archives a priorité sur leur traitement.
  • Dans le dialogue avec les partenaires de diffusion et production, un positionnement clair sur l’importance des représentations avec des publics scolaires  est systématiquement mis en avant.
  • Chaque projet n’excède pas 45 min au plateau. Cette contrainte vise à satisfaire plusieurs objectifs : la facilitation d’une programmation de l’ensemble des productions ainsi que de possibles aménagements d’une rencontre avec le public scolaire.
  • L’ensemble du projet s’inscrit dans une perspective écologique notamment à travers l’attention portée aux stockage des données, la mutualisation des moyens de production, de diffusion, de conception et de stockage dans un souci de partage
  • Une attention particulière est portée non seulement à l’emploi d’outils numériques libres, mais aussi aux difficultés liées à la fracture numérique. Tant les artistes que les membres du comité d’accompagnement et les personnes en charge de la production veilleront à user d’outils informatiques accessibles à toutes et tous, sans démultiplier les applications, les logiciels desquels disposer.
  • Nous tentons de produire nos décors de manière la plus écologique possible : revalorisation de matériaux, fournisseurs éco-responsables et vigilance sur l’empreinte carbone globale de notre activité (crabe collectif).
  • Le volume total de la scénographie est conçu pour être contenu dans une camionnette qui peut être conduite avec un permis de conduire normal.
  • L’emploi est le premier poste de dépenses. Par ailleurs, La Deuxième Scène s’engage à long terme sur une réflexion sur les inégalités inhérentes aux pratiques salariales en partenariat avec Le festival féministe interdisciplinaires de la ville de Bruxelles et la CCTA.
  • Au moins 60 pour cent de la masse salariale est féminine*.
  • Un total d’au moins un tiers des acteur·rices est composé de personnes ne jouissant pas du régime d’indemnisation spécifique aux travailleur·euses saisonnier·es et aux artistes.
  • Comment être gentille quand on en a vraiment marre? Comment cultiver une communication tissée de confiance et du désir d’avancer ensemble, malgré les éventuelles difficultés? Comment parvenir à se souvenir que chacun·e fait de son mieux en fonction de sa compréhension des situations et tenter de dissiper rapidement les malentendus? Pas de réponse toute faite, mais l’envie est là…